La culpabilité verrou de la transidentité

150525_CulpabilitéLa culpabilité est un verrou de la transition. Nous sentons que si ce verrou saute, un processus pourra démarrer, avec sa part d’inconnu qui fait souvent reculer a priori. O préfère oublier. On préfère culpabiliser. Culpabiliser c’est confortable. C’est un terrain connu. Si bien connu ! La culpabilité, c’est LE point de blocage en ce qui me concerne qui a sauté à l’instant précis ou j’ai pris conscience que cette culpabilité ne reposait sur rien, que mon désir de féminité ne faisait de tort à personne. Quand bien même ce désir puissant d’être une femme dans le monde n’aurait été que pure fantasme sexuel il ne faisait de tort à personne.

J’ai un jour arrêté de culpabiliser envers mes proches et la terre entière sur la question de ces pulsions. Ouf ! je n’avais pas de fantasme impliquant de faire souffrir d’autres personnes (enfants, animaux, extra terrestre) au contraire j’étais plutôt la victime non consentante dans mes scénarios fantasmatiques. Ce fut déjà un soulagement de pouvoir vivre peu ou prou mes fantasmes sans me dire « c’est mal ». Je jouissais déjà beaucoup mieux !

La culpabilité concernant la transition est une autre paire de manche. C’est l’obstacle le plus difficile à franchir. La démarche de transition est un acte forcément public et la plupart du temps considéré comme égoïste par l’entourage et par les personnes trans elles-mêmes. Alors on recule devant ce jugement terrible de l’égoïsme. On culpabilise avant même de démarrer, on vit son genre féminin en catimini, dans le secret de son chez-soi, sur Second Life en ce qui me concerne, seule si possible, ou bien avec d’autres avatar virtuels. D’autres se permettent un jour de sortir, la nuit. D’autres attendent comme cela, vivant de furtifs expédients. Attendent la majorité de leurs enfants pour ne pas perturber leur études, puis attendent la retraite, la mort de leurs parents, de leur conjoint (ou la séparation). Bien des personnes trans intériorisent la transition comme un acte égoïste. Elles ne sont pas les seules.

Le terme égoïsme contient une dimension péjorative de jugement. C’est pourquoi je ne le retiens pas comme élément de langage. Je préfère parler de démarche personnelle, d’accomplissement personnel. Cette démarche n’est pas orientée contre les autres, qui peuvent même en récolter quelques fruits. Je n’irais pas pour autant prétendre qu’elle serait faite POUR les autres. Elle est juste pour SOI, mais pas égoïste car ce n’est pas parce que l’on prend soin de soi que l’on cesse de prendre soin des autres

En résumé c’est ce que j’expliquais à mes enfants : Ce n’étais pas parce que je décidais sans discussion possible que je cessais la mascarade de mon rôle masculin dans l’espace public autant que privé, ce n’était pas parce que j’allais faire une transition vers une apparence féminine, et ce, sans leur demander leur avis que j’allais pour autant cesser de les aimer, de les considérer comme mes enfants. Ils n’étaient pour rien dans cette décision. Ils n’étaient ni responsables, ni décisionnaires. Et ma promesse (que je tenais déjà faut-il le dire) était de ne jamais je me mêler de leurs « oignons » dès lors qu’il s’agissait de la réalisation de leurs désirs.
Les autres peuvent considérer que c’est CONTRE eux que l’on transitionne. Ce n’est pas le cas bien entendu mais rien n’aide à ce que ce ressenti négatif n’apparaisse pas à un moment ou un autre. Il faut leur expliquer autant que possible (pas toujours possible) que la démarche n’est ni pour eux, ni contre eux, mais que l’idéal si ils ou elles acceptent cette transition le parcours peut se faire AVEC eux, en les informant honnêtement de ce qui se passe et probablement se passera comme changements corporels et d’apparence. D’autres forces obscures leur souffleront sans doute des idées du genre : « IL est égoïste », «  IL ne pense qu’à lui », voire : « mais que fait tu donc à rester avec UN égoïste pareil » ? On ne peut pas contrôler toutes ces mauvaises influences externes, alimentées et confortées par le discours ambiant, la non considération des personnes trans par le pouvoir (la france ne reconnait pas cette liberté individuelle de transitionner et de vivre dans le genre que l’on souhaite, ou dans le « non-genre » que l’on souhaite). La norme de genre puissante se présente comme le seul schéma possible (et « naturel ») : l’hétéro patriarcat triomphant. On gobe ça. Trans ou pas. Et c’est avec ces idées qu’on culpabilise quand ça ne colle pas à nos désirs. Pas besoin d’être trans pour ne pas être à l’aise dans la norme, mais être trans ne signifie pas rejeter cette norme. C’est souvent l’inverse. Bien souvent les personnes trans veulent juste vivre cette norme en jouant l’autre rôle ! C’est problématique. En tous cas lorsqu’on cherche à comprendre comment cette norme est à la fois une oppression, et la source d’un désir de la vivre autrement. Il ne faut juste veiller à gober soi-même ces normes sans y réfléchir, comme on prend une ovule de progesterone. Si on a intégrées ces normes, ce qui est presque toujours le cas, il faut « juste » les relativiser, penser que d’autres normes sont possibles, existent, sont légitimes, qu’on a le droit aussi de « choisir sa case » dans cette norme. Mais ça passe par la prise de conscience, et la fin de la culpabilité. Cette prise de conscience peut prendre du temps ! Plus de temps qu’une transition ! Mais c’est le seul moyen de passer ensuite à l’acte de la transition. SI l’on ne sort pas de la culpabilité on avance pas.
OUI on peut être un bon parent, et pourquoi pas une bonne compagne si l’autre le souhaite. Et comme j’ai déjà dit, l’AUTRE à le droit de dire aussi « je n’ai pas passé ce contrat, je ne poursuis pas la relation » ou bien plus soft «  je ne poursuis pas la relation telle qu’elle était ». C’est normal, c’est légitime, c’est pas de la transphobie, c’est le simple exercice de sa liberté individuelle. Aller avec qui on veut (qui le veut aussi), quand on veut (et quand on peut). Venir, partir, changer d’avis, transitionner, un peu, beaucoup, dé-transitionner… Tout est possible sans la culpabilité, et sans faire de tort à quiconque. Mais cette liberté que l’on prend, il faut aussi l’accepter en retour de la part de ses relations, familles compagne, enfants… On est pas seul (seule) à décider. On décide pour soi. C’est aussi du ressort de l’autre de décider pour lui. C’est aussi sa part possible « d’égoïsme » pour autant que ce terme soit compris en positif, comme liberté de choisir pour soi, et pas contre les autres.
Et puis dussent les autres en souffrir, nous ne sommes pas responsables de cette souffrance. C’est la non-conscience de la norme qui est responsable de cette souffrance. On ne peut pas en tant que trans éduquer tout le monde. On peut essayer un peu de pédagogie avec l’entourage, on ne peut pas tout régler.
La culpabilité est donc un obstacle à la transition. Ce n’est pas le seul. Il y a aussi l’abandon des privilèges cis-genre qui peut rebuter. Mais c’est une autre histoire. L’histoire de l’abandon des privilèges octroyés aux hommes dans le système patriarcal et qu’il va falloir abandonner.

Transition douce

 

Roman Opalka

Roman Opalka

Pour ce qui est du rythme de nos transitions nous avons deux façons différentes d’avancer, qui nous correspondent. C’est très bien comme ça. Ma façon à été très rapide et ma copine me l’a reproché. Ça aurait pu bouziller notre relation inutilement. Donc aller vite ce n’est pas la panacée, mais au final, c’est « passé » ! (enfin le final on ne le connait pas, les choses ne sont jamais figées tant que nous sommes vivantes !)

Je pense qu’en fait je n’ai rien à dire sur le rythme que tu choisis d’adopter. Mais poser les choses clairement à tes proches peut se faire sans bousculer ton rythme, c’est plutôt ça que j’avais envie de te dire.

Et puis c’est compliqué d’impliquer les autres dans nos décisions. J’ai le sentiment que de leur laisser une part de décision, c’est aussi leur transmettre une part de responsabilité. Et je ne pense pas que cela puisse bien fonctionner pour ce qui est de modifications de notre apparence de genre qui nous concernent. Je suis pour annoncer les choses posément, expliquer ce qui peut se produire concrètement, préciser grosso modo l’échéance et dire ce qu’on souhaite pour la suite de la relation (donner l’état de ses sentiments).

Pour ce qui te concerne, tu entames un procesus avec les hormones mais ne souhaite pas en parler pour l’instant. Tu penses que c’est trop violent (tout dépend comment c’est annoncé, mais effectivement ce n’est pas anodin, tu le sens bien). Les modifications corporelles liées à la prise d’hormone sont très différentes selon les personnes. Bien souvent toutefois, les changements sont assez visibles à partir de 3 et 6 mois. Si tu es quelquefois dévétue devant ta femme, il peut devenir assez vite difficile de faire semblant de rien !

Je pense que tu as raison d’acculturer ta femme par des lectures choisies (encore faut-il qu’elle ai envie de les lire, ce qu’elle pourrait ressentir comme une acceptation qu’elle n’est pas prête à accorder maintenant). Tu espères la convaincre que pour votre enfant de 15 ans ça ne posera pas de problème. Est-ce que tu en es convaincue toi-même ?

Je pense que des problèmes peuvent se poser liés aux modifications de l’apparence. Ces problèmes ce n’est pas nous qui les posons mais les tas de gens qui ne sont pas prêts à accepter cette fluidité du genre. Il est difficile de savoir à l’avance quelles personnes nous soutiendront, quelles personnes seront indifférentes, et quelles personnes vont s’opposer et quelquefois même tenter de nous nuire. C’est en avançant dans la transition qu’on peut agir quand les problèmes surviennent avec les autres (l’enfer c’est toujours les autres !), mais je pense qu’il est la plupart du temps impossible de prévoir ces problèmes. Ils sont inévitables, quelque soit le temps que l’on prenne à transitionner. Il ne faut pas s’en faire une montagne. On a parfois tendance à les imaginer plus importants et plus nombreux qu’ils ne le seront. Ce qui fait peur c’est leur potentialité. Une fois qu’ils sont là ils ne font plus peur. On gère.

Moi je pense qu’un enfant de 15 ans à qui on parle avec pédagogie est capable de comprendre et d’accepter. Comme ta femme d’ailleurs. Tout le monde peut comprendre. Mais tout le monde ne veut pas forcément le faire, ou bien n’a pas toutes les cartes en mains pour comprendre, souvent par manque d’information correcte.

Ça veut dire quoi parler à son entourage ? Pour moi le message à mon entourage proche fut très simple, je l’avais construit comme ça :

1 – J’AI quelque chose à te dire qui me tient à cœur : JE vais faire une transition et changer d’apparence physique. JE vais devenir une femme. Ça va prendre du temps mais c’est en route.

2 – TU N’ES PAS EN CAUSE, ce n’est pas de ta faute, tu n’as rien à voir avec cette décision que j’ai prise. j’ai pris cette décision car ça me correspond (message positif) je ne supporte plus de vivre en homme (en négatif). Quoi qu’il en soit tu n’es pour rien dans cette situation ET dans cette décision de changement. J’assume tout.

3 – JE T’AIME de la même façon car je suis et je reste la même personne. Pour moi notre relation ne va pas changer. On parle de modification extérieure, pas de sentiments intérieurs. (pour ma copine j’ai ajouté qu’elle se sente libre de stopper la relation si cette modification ne lui allait pas, mais que moi je ne souhaitais pas stopper la relation de mon côté car mes sentiments pour elle étaient toujours là)

4 – (Conclusion) : COMMENT TE SENS-TU avec cette information ? Je ne te demande pas de décider pour moi, mais je peux t’aider si tu as des difficultés à comprendre, à accepter car je me suis documentée. On peut en discuter, je comprends que dans le contexte ce n’est pas facile à avaler, le genre étant une norme tellement importante, bla bla bla (fournir infos, aller sur les bons sites, faire rencontrer d’autres personnes trans, etc… pédagogie quoi !)

Peut-on éviter cette étape du coming-out en menant une « transition douce » ? Une transition qui ne heurterait plus la sensibilité des autres, qui se ferait « naturellement ». Nous serions donc reconnues de façon « naturelle » par nos proches, qui accepteraient notre nouvelle évidence. Oui bien sûr dans la rue, avec des inconnus c’est possible, et ça nous fait plaisir cette absence de passé, cette essentialisation de notre identité ! Comme tout le monde quoi ! Mais avec les proches c’est autre chose. ceux qui connaissent notre passé ne sont pas prêts à nous accorder la naturalisation de notre identité si facilement !

Faux cheveux, vraie tête

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© recuphair.com
Ce matin, j’ai reçu ce mail d’une amie : 

« … comme je commence vraiment a en avoir marre de mes faux cheveux, eh bien je ne les ai pas mis. Decision tres courageuse, car j’ai commencé a croiser une voisine dans l’escalier !! puis un immense groupe d’hommes saouls rue R., mais j’ai courageusement fait face et tout s’est bien passé

Je crois bien que c’était la premiere fois que je sortais avec ma vraie tete. Bon je n’etais pas completement depaysée car depuis 1 mois maintenant, je vis ainsi chez moi, et mes visiteurs ont l’obligation de me voir telle que je suis, que ca leur plaise ou non »

Ma réponse à cette amie :
Pour ce qui est de la question des cheveux (et du reste) ce qui compte c‘est que tu te sentes bien, que tu fasses les choses qui te font te sentir à l’aise.
Je me questionne sur ce que tu dis, les faux cheveux, la notion de courage… et voici le fruit de ma réflexion, sans doute trop rapide j’en conviens !
Si tu es plus à l’aise sans cheveux additionnels tu as raison de ne plus en porter, mais pour moi ce n’est « moralement » pas mieux ou moins bien d’en porter ou pas.
Comme tu es bien placée pour le savoir, la féminité se construit, qu’on soit une personne trans ou cisgenre ne change rien à cette affaire. Moi je me colore les cheveux, je les coupe et fais des brushing. On pourrait très bien voir là quelque chose de « faux ». Je ne le ressens pas comme tel. C’est pourquoi je n’associerais pas forcément le port ou pas de cheveux (additionnels ou pas d’ailleurs) comme quelque chose de vrai ou de faux (tu parles de faux cheveux, de ta vraie tête). C’est ce que tu ressens cette fausseté mais pour moi dès lors que tu les portes ils font partie de toi, ils sont aussi vrais que tout ce qui constitue l’expression véritable de ton apparence.  Féminité, masculinité, féminité masculine, masculinité féminine, etc. Pour toi ou moi disons plutôt une féminité binaire traditionnelle hé hé… Pas de fausseté pour moi dans tout ce que nous pouvons utiliser pour nous sentir bien avec notre apparence, dans tout ce que nous utilisons pour exprimer notre « identité de genre » de façon conforme à la façon dont nous voulons être perçues : coupe de cheveux, manucure, maquillage, vêtements, bijoux, tatouages, travail de la voix, attention portée à sa posture, démarche, épilation, transformation corporelles via hormones, opérations chirurgicales… rien de faux dans tout ça. Construction consciente et réfléchie de son apparence mais pas triche ou imposture (lire Julia Serano à ce sujet : Manifeste d’une femme trans). Cette construction n’est pas le fait des seules personnes trans mais de tout le monde, et personne n’aurait l’idée de dire qu’une femme cisgenre exprimant sa féminité devient fausse (n’est plus une femme) si elle s’ajoute des cheveux.
Après avoir dit cela, il est vrai que les efforts consentis pour construire notre apparence peuvent représenter plus ou moins de contraintes ressenties. Ces contraintes peuvent être plus ou moins pénibles, plus ou moins supportables, plus ou moins RENTABLES j’ai envie de dire. Dans le cas de cheveux additionnels je suppose que le port quand il fait chaud par exemple peut être pénible, ou bien l’entretien peut être fastidieux… C’est cet aspect purement fonctionnel que je retiens. Ce pur aspect matériel constitue un critère de « rentabilité « ou d’éfficacité (ce qu’on dépense d’énergie et ce que ça rapporte), qui permet de juger qu’on a envie de s’en passer car le bénéfice d’apparence s’avère moins élevé que le déficit de soucis matériel que cela donne. Au dela donc de cet aspect pragmatique, j’évacue en ce qui me concerne tout jugement de vérité sur les modifications d’apparence (de genre ou autre).
En gros ce que tu « performes » devient vrai à la seconde ou tu le co-produis avec le « spectateur ». Cette « performance » n’est pas que TA production, tu n’es pas la seule sujet agissante car les « regardeurs » agissent aussi et ce sont eux qui te « font femme » . Ce sont eux qui agissent principalement puisque ce sont eux qui produisent ton genre, soit en t’assignat correctement, soit en te « mal-genrant » (cf Julia Serano)
Voilà le fond de ma pensée, tirée de mon expérience et de quelques maigres lectures. j’espère n’être pas trop séche dans la forme car je n’éprouve que de la bienveillance pour tout ça, et pour toi en particulier. 🙂

Modifier mon corps pour modifier mon genre

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Jim Broadbent in Brazil (1985). Photograph: Ronald Grant Archive

Je ne suis pas née dans le mauvais corps, mais j’ai été assignée dans le mauvais genre, parce que j’avais les organes génitaux visiblement mâles. J’entends souvent dire « je suis née dans le mauvais corps », je veux préciser qu’en ce qui me concerne, le mauvais corps, c’est par rapport au genre (rôle de genre ?) que je souhaite socialement incarner, et pas rapport à mon esprit. Car franchement, je ne me sens pas un “genre” particulier. Je sens que je respire, que je sens, que je touche, que j’entends, etc. Je sens que j’existe, et qu’on m’a fait jouer un rôle que je déteste, et que j’ai voulu changer cela à un moment donné de ma vie.
Je souhaite être classée au quotidien dans le genre féminin, c’est pourquoi j’ai modifié mon corps et mon apparence par les hormones et la chirurgie, le travail de la voix, les vêtements, le comportement social, la démarche, la gestuelle,… tout cela se transformant quelquefois sans même y penser. Ces transformations ne sont pas là pour faire correspondre mon corps à mon “esprit” ou ma « nature féminine ». Je ne répare pas une erreur de la Déesse Nature, je répare une erreur de l’état civil. Pour réparer, je modifie mon corps pour être identifiée dans le genre féminin que je désire. C’est dans ce genre que je me sens bien.
Tout cela pour dire que sans remettre en question les différences biologiques entre les sexes (reproduction toussa…), je suis la preuve vivante que c’est mon apparence et non ma biologie qui détermine mon genre. La société détermine mon genre en fonction de ce qu’elle voit, sur moi et aussi sur mes papiers, et par conséquent avec un peu de chance, d’argent et pas mal d’énergie (peu de courage au final) j’ai pu faire quelques retouches d’apparence pour modifier mon corps et ensuite mes papiers, et être enfin identifiée dans le genre que je désire !

In Nomine JogJakartus, Hammarbergem, et Transidentitum, Amen.

Ladies and gentlemen, sous vos yeux ébahis : L'INDISCUTABLE VÉRITÉÉÉÉÉ !!!! (Et on l'applaudit bien fort merci.)

Ladies and gentlemen, sous vos yeux ébahis : L’INDISCUTABLE VÉRITÉÉÉÉÉ !!!! (Et on l’applaudit bien fort merci.)

Voila quelques temps maintenant que je me tiens confortablement à distance du « lobby trans » qui ne me manque pas spécialement. Mais la lecture récente d’un article couplé à l’écoute d’un podcast m’ont fait prendre conscience de quelque chose par rapport à ce petit milieu je crois. Je ne sais pas si c’est intéressant, mais je le partage quand même ici, puisque je pense que le lectorat de ce site est finalement directement concerné.

Je n’aime pas beaucoup les religions ; ce n’est que mon avis perso, donc à la rigueur on s’en fout. Pourtant, je viens de me faire la réflexion que pas mal d’entre nous (je ne m’en exclus pas) ont sans forcément s’en apercevoir une approche strictement religieuse des histoires d’identité de genre.

Au fil de mes lectures, je viens de tomber sur un pamphlet de style 100% religieux qui se targuait pourtant d’être une sois disant « analyse ». Du genre qui n’apporte rien et ne tolère rien d’autre que la croyance unique à laquelle il se rapporte, de façon assez intégriste. Un texte qui ne s’encombre pas vraiment d’argumentation, et qui ne s’appuie que sur des textes sacrés afin de justifier son propos, et de tenter vainement d’orienter l’avis des lecteurs (& auditeurs) qui pour la plupart n’ont rien lu de ces textes et ne les liront jamais parce qu’ils s’en contrefoutent. (Et ont bien raison).

Des versets prétendument clairs (mais pourtant parfaitement obscurs pour le commun des mortels) sont cités ça et là, dans l’espoir de prouver que celui ou celle qui le cite a indiscutablement raison. « Raison » en comparaison de tous ceux qui ne reconnaissent pas la légitimité dudit texte, et qui sont donc forcément soit dans l’ignorance soit dans l’erreur la plus absolue.

La dévotion totale de celui qui cite ces textes envers l’idéologie qu’ils sont sensée illustrer suffirait donc à conférer audit texte (et donc à ladite idéologie) un indiscutable véracité, et (donc) le droit d’influer « légitimement » sur l’ensemble de l’humanité au nom de cette foi.

Pourtant ces bibles pleines de bonne volonté, ont bel et bien été accaparées par des personnes humaines. Qui se les sont réappropriés afin de les transmettre, les inculquer, voire les imposer légalement aux autres en fonction de ce qu’ils en ont compris, et de la façon dont ils les ont interprétées. (Et sans doute en fonction d’intérêts inconsciemment personnels, mais pourtant sincèrement envisagés comme étant ceux de l’humanité entière).

Ce clergé bienveillant a de plus en plus de fidèles : Des gens divers dont certains souffrent beaucoup, dont d’autres sont un peu perdus, ou influençables, et qui ont besoin de croire que tout peut un jour aller mieux. Que leur monde sera sauvé. Mais la bonne parole prétend que ça doit bien entendu passer par la soumission de chaque humain à une « loi » ferme et unique sans laquelle rien ne peut fonctionner. Des fidèles qui – à la simple lecture de cette « loi possible » (terre promise?) qui leur donne tant d’espoirs, se prosternent sans plus poser (ni SE poser) la moindre question, puisque Dieu et l’élite de l’Église ont déjà réfléchi pour eux et à leur place.

Ces intouchables et indiscutables textes sacrés sont (par exemple) les principes de Jogjakarta, ou les 12 recommandations d’Hammarberg.

J’imagine fort bien que la récente doctrine qui s’appuie sur ces ouvrages n’a sans doute été conçue qu’à des fins honorables, pour aider l’humanité et la société toute entière. (À moins que ça n’ait pour unique objectif que de faciliter la vie à la poignée de trans qui se sentent concerné(e)s. Pour qu’elles se sentent enfin plus légitimes, protégées, libres, moins coupables d’être ce qu’elles sont, de penser ce qu’elles pensent, ou d’avoir le parcours qu’elles ont. Et ce, au détriment des convictions intimes de beaucoup d’autres gens – y compris d’autres trans qui par contre ne se sentent absolument PAS concernées).

Les douze commandements d’Hammarberg sont brandis par certain(e)s comme un éclairage absolument sans appel. Une avancée irréfutable d’une légitimité absolue.

Pourtant, la recommandation citée dans le texte qui a déclenché ma « réflexion » (en l’occurrence la 5 : Remboursement intégral de tous les soins attenants à une transition par la CPAM) me parait personnellement injuste pour les autres et donc très discutable – même si il est évident que ça m’arrangerait bien à titre personnel que cette loi soit en place. J’estime avoir le droit de penser objectivement que c’est injuste et discutable, et de l’exprimer.

Mais en fait, non. Si on ne croit pas au texte, le reste s’effondre, puisqu’il n’y a désormais même plus l’effort d’une argumentation. Du coup, toute remise en question desdits textes est devenue inconcevable et éliminatoire.

C’est donc en lisant et écoutant ce tas d’affirmations péremptoires ne reposant finalement que sur de la « foi », qu’un paquet de paradoxes m’ont sautés au visage : J’ai vu une doctrine qui prétend œuvrer pour la tolérance (et qui la réclame des autres à corps et à cris), mais qui se montre elle-même d’une intolérance et d’un dédain de l’autre incommensurables.

J’ai vu une Église minoritaire qui se réclame d’une ouverture d’esprit absolue, et qui pourtant est incroyablement cloisonnante et cloisonnée, tout en tentant à tout prix d’uniformiser la pensée des gens à l’image de la sienne.

Un clergé résolument manichéen, alors qu’il se défend généralement assez farouchement de toute « binarité ». Opposant ceux qui pensent comme lui (et qui ont donc « tout compris » et sont les « gentils », les garants de la liberté) à ceux qui pensent différemment (et sont donc automatiquement catégorisés comme des ennemis de la justice, les opposants aux droits humains : Des « coupables », à raisonner ou convertir. Voire à écarter ou à bannir).

C’est pourquoi j’ai eu l’impression de voir à travers la forme et le fond de ces discours une énième croyance qui divise en prétendant rassembler, au même titre que n’importe quelle autre religion.

Je précise que personnellement, je suis dans l’ensemble plutôt d’accord avec les recos d’Hammarberg, ou les principes de Jogjakarta, et avec celles et ceux qui portent ces textes. C’est par contre ce qu’est devenu notre façon de considérer ces textes et de les diffuser qui m’a amenée à ce constat un peu gênant.

Je m’estime (de façon certainement très prétentieuse) assez bien placée pour parler de cet état « d’illumination », puisque ayant longtemps été confite dans la doctrine en question, j’ai tenu sensiblement les mêmes discours quasi-religieux. (Au point d’accoucher d’un site sur la question que je ne laisse en ligne qu’afin de bien me souvenir de ce que j’ai été capable de penser et d’écrire sous l’emprise de ce que je considérais alors comme une inaltérable vérité absolue. J’avoue en avoir plutôt honte aujourd’hui).

Le problème est que celles et ceux qui estiment encore qu’Hammarberg reste « discutable » deviennent « personas non gratas » dans certaines confréries de trans sous prétexte qu’elles ont forcément raté des épisodes. Ou (si elle n’en ont manifestement raté aucun), elles sont donc ennemi(e)s de la liberté et des droits humains dans la tête de certain(e)s. C’est en cela qu’il me semble que tout ça n’a plus rien d’un débat constructif, ouvert et évolutif, mais que ça prend de plus en plus l’allure d’une guerre de religions scriptée, et de plus en plus fermée.

Pour résumer, je supporte de moins en moins de voir systématiquement certain(e)s (au même titre que les 3 monothéismes ou n’importe quel parti politique qui fonctionnent aussi comme ça) confondre leur foi intime avec un savoir qui devrait s’imposer à TOUS. De les voir sans plus rien argumenter se contenter de brandir des textes dans lesquels tout est déjà écrit, et auxquels il ne reste donc plus qu’à croire & obéir.

Vous vous demandez bien pourquoi je viens parler de ça ici  – dans la mesure où manifestement j’en ai plus grand-chose à foutre de ces problématiques, et qu’en plus je reconnais volontiers que je ne m’exclus même pas de ce triste fonctionnement ?

Je me demande aussi…

Sans doute parce qu’il est toujours très désagréable de s’apercevoir que si je ne parle plus de ma propre foi (qui ne vaut pas mieux que celle des autres – mais pas moins non plus), d’autres prendront mon tour pour dire leurs conneries à ma place, voire même prétendument « en mon nom ». Et que quand c’est fait d’une façon qui me déplait fortement, mon ego démesuré et mon esprit chafouin ne peuvent s’empêcher de s’en offusquer, et de faire une petite mise au point.

(Je crois que je suis une vilaine. Pardon).

« Mariage pour tous »

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Même si je trouve personnellement que l’homosexualité n’a strictement aucun rapport avec la « transidentité », je remarque que dans la mesure où un T et un I ont étés depuis peu accolés au LGB,  je me retrouve d’office étiquetée dans ce truc.

Et en tant que « transgenre », je me retrouverais possiblement par rebond à la même enseigne que les Gays d’un point de vue légal concernant le mariage si jamais j’avais eu le malheur d’être attirée par les mecs.

C’est pourquoi je me fends de ce petit article. (Qui est en fait trèèèès long, pardon).

***

Le 2 février 2013, la France a adopté le premier article de la loi pour le « mariage pour tous ». Cela a occasionné un certain nombre de manifestations et de réactions de la part de nombreux opposants. (Manifestations qui continuent pour que la loi soit supprimée alors qu’elle est désormais adoptée par l’Assemblée Nationale).

J’ai relevé 10 arguments récurrents des opposants à cette loi. (Le 10e est étrangement moins mis en avant, alors que c’est pourtant à mon humble avis le plus récurent de tous.)

1- Nous sommes TOUS issus d’un père et d’une mère.

2- Le mariage, ça signifie la FAMILLE et deux homos ne peuvent par essence PAS fonder de famille.

3- Marier deux personnes du même sexe est CONTRE-NATURE tout comme la PMA ! (négation d’une réalité biologique INCONTESTABLE).

4- Marier deux personnes du même sexe est MORALEMENT indéfendable.

5- L’enfant n’est pas un DROIT : Un enfant a absolument besoin d’un père et d’une mère pour s’épanouir NORMALEMENT et de façon ÉQUILIBRÉE.

6- Je ne veux pas que MES enfants soient incités à l’homosexualité par les manuels scolaires !

7- « Si on commence à marier des homos, on finira par marier des ANIMAUX ensemble », (d’après Me. Christine Boutin) ou pire : Les membres d’une même FAMILLE ! Le père et le fils !!!

8- Si on légalise le mariage pour tous, il n’y a pas de raisons qu’on ne légalise pas la polygamie ! (D’après M. Alain Soral).

9- Il n’y a pas eu de RÉFÉRENDUM ! Et c’est naturellement avant tout aux FRANÇAIS de décider de ce genre de changement qui va irrémédiablement bouleverser TOUTE la société !

10- Et (plus simplement) je suis CONTRE le mariage de deux personnes du même sexe car cela ME dérange profondément et viscéralement.

J’ai fais le choix d’énumérer les arguments les plus tangibles et d’éliminer les « bondieuseries » manifestes que n’importe quel enfant serait capable de démonter facilement. J’ai fini par comprendre que ça ne servait généralement à rien de tenter de débattre logiquement avec des religieux illuminés dont les repères sont Adam et Eve,  ou la vérité indiscutable d’un message prophétique entre autre pensées et superstitions magiques. Je laisse ça à ceux que ça amuse encore et qui en ont le temps. (Même si je tolère naturellement les gens qui ont besoin d’un dieu pour régir leur propre vie – tant qu’ils n’en font pas une loi pour régir également la vie des autres, et y compris celle des non-croyants.)

Personne ne m’a demandé mon avis à moi sur cette question du mariage pour tous. C’est très injuste dans la mesure où je subis les avis de tout le monde dès que j’allume Internet ou une télé. J’en suis fort agacée à la longue, et je vais donc m’empresser de vous infliger ma petite opinion!

Pour cela, je vais reprendre chacun des arguments que j’ai pris la peine de lister plus haut, avant de terminer par ma conclusion personnelle sur ce sujet qui me fatigue au plus haut point.

1- Nous sommes TOUS issus d’un père et d’une mère.

C’est indiscutable, même si cela n’a strictement aucun rapport avec le mariage, et que cela est donc complètement hors sujet.

Car nous étions déjà tous issus d’un père et d’une mère bien avant que l’idée même de mariage ne soit inventée par les prêtres ou la législation. C’était déjà le cas à la préhistoire, et même un peu avant, du temps ou nous mangions encore des bananes dans les arbres. C’est la société et la culture qui nous ont apporté le concept du mariage, et qui l’ont rendue indissociable de la reproduction et de l’idée de famille d’un point de vue purement moral et culturel. Ce prétendu argument qu’on voit sur les banderoles n’a donc strictement rien à voir avec le concept de mariage. Donc déjà, ça, ça dégage.

 

2- Le mariage, ça signifie la FAMILLE. Et deux homos ne peuvent par essence PAS fonder de famille.

C’est tout à fait exact. Et deux gays ou deux lesbiennes ne pouvaient par essence pas fonder de famille PRÉCISÉMENT parce que  la loi le leur avait interdit jusqu’ici, sinon, ça serait fait depuis longtemps. Mais à présent que le mariage est accessible à tous, rien ne les empêche plus de fonder une famille, à condition qu’on légalise également la PMA  et l’adoption d’enfants (pour celles et ceux qui n’en ont pas déjà). Cet « argument » va donc très possiblement devenir aussi faux que les autres dans le futur, et il ne reposait que sur la supposition qu’une situation d’injustice légale subie depuis toujours détermine l’essence et la normalité des choses.

 

3- Marier deux personnes du même sexe est CONTRE-NATURE tout comme la PMA ! (Négation d’une réalité biologique INCONTESTABLE).

La nature est toujours un argument SUPER pratique et intéressant, car elle est tellement variée et diverse que l’on peut toujours arriver à lui faire dire à peu près ce qu’on veut. L’homosexualité est observée chez nombre d’espèces animales dans la nature, ainsi que la masturbation, l’hermaphrodisme, l’infanticide, le parricide, l’inceste…

Et si jamais on s’amuse à regarder les végétaux (qui sont globalement la forme de vie DOMINANTE sur notre planète après les insectes), ça devient vite de la folie car on observe chez eux des modes de reproduction et une diversité des genres « sexués » encore plus variable et complexe.

Je ne vais pas jouer à lister tout ça auprès de gens qui (de toute façon) ne verront assurément que ce qu’ils ont décidé de voir. Mais l’homosexualité et la diversité des genre sexués est indéniablement présente dans la nature que ça nous plaise ou non.

Je veux bien – à la rigueur – me cantonner aux animaux les plus évolués pour faire le lien plus tangible entre l’humanité et la « nature », faute de quoi, je pourrai même expliquer qu’attaquer ses gosses (ex : lions), décapiter son partenaire après l’accouplement (mantes) ou le bouffer (araignées) peut être parfaitement observé comme comportement au sein de la « nature » dont il faudrait peut être s’inspirer?

Donc si on se réfère précisément aux comportements sociaux des grands singes, et des mammifères les plus évolués, (dont nous descendons le plus directement), on constate que les rapports homosexuels sont encore plus présents qu’ailleurs.

On constate aussi que bien souvent, les jeunes primates (abandonnés ou orphelins) sont adoptés, élevés, et socialisés par la communauté, qui n’est donc pas forcément constitué des deux parents biologiques.

Et pour aller plus loin sur cette histoire de trucs « naturels » et « pas naturels », je ferai remarquer que la médecine et la technologie en général, sont parfaitement « contre nature », et ce, quelle que soient les étiques qui les utilisent. (Et ça aussi c’est une réalité biologique incontestable : les chimpanzés les plus évolués de la terre n’ont jamais construit d’ordinateurs et n’ont pas recours à la péridurale pendant leurs accouchements : Ce n’est donc pas « naturel »).

Concernant la PMA, je mentionnerai bien volontiers le mode de reproduction de certaines fleurs, qui nécessite pour leur survie une exclusive pollinisation par les insectes. (Ce qui revient donc très exactement à une reproduction assistée « naturelle »). Mais comme les fleurs ne sont pas des grands singes, tout ça ne compte pas vraiment bien sur…

Il me semble donc, aux vues de ces constatations, que jouer à brandir « la nature » pour définir et déterminer ce que devraient être ou non NOS comportements est systématiquement très bancal. Et ce, quel que soit la position que l’on essaye de défendre. Car à moins de vivre à poil dans la forêt, sans vaccins ni assistance médicale lors des accouchements, et de crever à 25 ans du 1er virus qui traîne comme au « bon vieux temps », il me semble compliqué d’être vraiment cohérents avec l’idée de « nature » et de « réalité biologique incontestable ». Sans doute parce que l’humanité toute entière est justement un mouvement qui n’a eu de cesse que de chercher à s’éloigner de la nature pour se libérer de ses contraintes, (voire même de SA nature qui plus est) – jusqu’à justement décréter sans plus pouffer de rire que deux spécimens humains ne pouvaient dorénavant se reproduire en toute bienséance que dans les liens sacrés d’un mariage par exemple.

 

4- Marier deux personnes du même sexe est MORALEMENT indéfendable.

Tout comme marier une personne de 18 ans à une personne de 70ans d’ailleurs, mais j’imagine qu’il faudrait commencer à légiférer sur ces unions scandaleuses ? Car nombre de mariages totalement IMMORAUX sont aujourd’hui pourtant parfaitement légaux et célébrés quotidiennement sans que cela n’engendre aucune manifestation indignée.

Certains feront remarquer que la morale est relative à la culture. Dans certains pays, (effectivement) il est parfaitement moral et normal de marier une fillette de 12 ans avec un homme qui en a 30. Ou d’envoyer les bambins travailler à l’usine. De violer une femme impunément. Légiférer et opprimer au nom d’une divinité… Nous ne faisons d’interventions « morales » dans ces pays que si il y a un petit profit à la clé, auquel cas le « droit d’ingérence » se transforme soudain en « droits de l’homme ». C’est marrant comme la moralité occidentale est justement évolutive selon le profit personnel qu’il y a à faire ou non…

La culture française ayant indéniablement évolué durant le siècle dernier, il est peut être grand temps que la loi (et la morale attenante) évoluent de concert, afin de ne pas se retrouver complètement en décalage avec la réalité sociale tangible des gens ? Certes, cela sera probablement long et difficile à accepter pour les personnes restées bloquées à une époque antérieure, sur des idées et des principes d’autres temps, et dans certains milieux. (Ou aux personnes désireuses d’importer et imposer leur propre identité culturelle religieuse, morale et communautaire dans un pays aux mœurs différentes, au lieu de tenter de s’adapter aux lois et à la culture dudit pays.)

Je ferai remarquer que ces personnes qui manifestent encore dans les rues (bien que faisant incontestablement partie de la société) ne sont finalement PAS PLUS représentatives de la société que ceux contre lesquels ils se dressent si farouchement.

Par contre, dans la mesure où ils refusent délibérément de simplement constater et reconnaître l’évidente évolution sociale du pays au nom de leurs propres valeurs aveuglantes, il me semble que ce sont EUX qui se retrouvent finalement inadaptés, avec des comportements typiques d’indépendantistes communautaires en décalage TOTAL avec la réalité.

 

5- L’enfant n’est pas un DROIT : Un enfant a nécessairement besoin d’un père et d’une mère pour s’épanouir NORMALEMENT et de façon ÉQUILIBRÉE.

Je me pose souvent la question de la définition de l’enfant ? Ici, nous avons l’affirmation de ce qu’il n’est pas. Alors bien sur c’est bien joli de faire des phrases, et de les écrire sur des banderoles, mais ça veut dire quoi ? C’est quoi la définition de l’enfant ? Un devoir ? Une chance ? Un malheur ? Une ressource ?

Je trouve très intéressant (et paradoxal) de lire et d’entendre que l’enfant n’est pas un droit dans la mesure où l’enfant ouvre justement en France nombre de droits sociaux et fiscaux aux parents qui l’engendrent. (Tout comme le mariage). Ainsi qu’une distribution d’allocations prélevées à la communauté toute entière, y compris des homos. (Homos qui n’ont – de fait – aucun retour et passent leur vie à « financer » les enfants des autres).

Allocations « d’encouragement et de soutien » versées lorsque deux parents qui n’ont manifestement pas les ressources suffisantes pour faire un gamin décident malgré tout d’engendrer un énième chômeur au nom de je ne sais quoi. (La « nature » certainement – car ça ne peut décemment pas être au nom de la logique ou du bien de l’enfant).

Il me semble d’ailleurs que dans la mesure où l’enfant est une entité tellement « sacrée », il devrait être interdit au mâle et à la femelle qui l’ont engendré de se séparer. Le divorce me semble donc être une loi tout aussi contre nature que le « mariage pour tous », puisque ce sont les enfants qui trinquent, et qu’ils ont (parait il) ABSOLUMENT besoin d’être élevés dans les meilleures conditions qui soient, par un papa et une maman qui s’aiment, sans quoi ils deviendraient assurément fous ?

De plus, il est très important de souligner que ce n’est jamais facile d’être l’enfant d’un couple d’homos ! Imaginez un peu le jugement des autres, les quolibets à l’école, et la souffrance qui découle de se ressentir fondamentalement anormal ? Ce n’est pas une vie pour un enfant !

Alors bien sur, il pourrait être intéressant de faire remarquer que ces jugements, ces quolibets, ces moqueries et ce sentiment d’anormalité ne sont précisément relayés QUE par les gens qui ont justement un problème avec le concept de famille homo-parentale. Et qu’à partir de là, ce sont précisément CES personnes qui sont les SEULS et uniques facteurs de souffrance des enfants en question, tout en prétendant la dénoncer. (Mais mieux vaut les laisser continuer à croire qu’ils œuvrent pour le bien des petits enfants, en entretenant la haine et l’oppression sur la différence de leurs parents.)

 

6- Je ne veux pas que MES enfants soient incités à l’homosexualité par les manuels scolaires !

Car il est bien entendu évident que les manuels INCITERONT fortement les petits enfants et les ados à l’homosexualité du simple fait qu’il y sera inscrit que cette possibilité existe. Nos enfants sont forcément stupides : Ils deviendront automatiquement hétéros, gays ou trans parce que le terme et le concept est mentionné dans un livre, et non parce qu’ils se reconnaîtront intimement dans ces identité. D’ailleurs, toutes les personnes hétéros risquent de devenir soudainement homosexuelles depuis l’adoption de cette loi, et c’est justement sans doute pour ça qu’ils défilent dans la rue : ça commence à les travailler au niveau du slip j’imagine. QUE FAIT LA POLICE ?

Notons au passage qu’il suffirait de supprimer l’homosexualité et la théorie des genres des manuels scolaires pour les LGBTI soient également miraculeusement effacés de la réalité! (Hop, pensée magique!)

Les manuels scolaires n’ont pour fonction que d’essayer d’informer et d’apprendre la notion du respect de l’autre aux enfants. Vouloir préserver à tout prix la combinaison [ignorance + intolérance] en lieu et place de la combinaison [connaissance + tolérance] me parait aussi débile que ceux qui le proposent.

7- Si on commence à marier des homos, on finira par marier des ANIMAUX ensemble, (d’après Me. Christine Boutin) ou pire : Les membres d’une même FAMILLE !

Christine Boutin souligne avec brio à quel point ça va vraiment finir par devenir n’importe quoi l’institution sacrée du mariage. Bon, alors évidemment, certains rétorqueront (avec une certaine mesquinerie) que Me. Boutin s’est mariée à son propre cousin. Alors que normalement elle n’avait pas trop le droit, et que c’est pas très catholique tout ça.

Mais bon vous comprenez bien que pour elle, c’était bien sur différent. Eh oui ! C’est pourquoi notre bon clergé lui a probablement accordé une petite dérogation spéciale rien que pour elle, en remerciement de l’énorme service qu’elle rend à notre chère nation…

Qu’elle ne soit pas capable elle-même d’appliquer dans sa propre vie privée les principes DE BASE qu’elle veut absolument imposer dans la vie intime des autres n’est qu’un détail apparemment. Ce qui compte vraiment, c’est qu’elle incarne à elle seule tout le crédit de la moralité et de la religion pour légiférer sur le droit des français à disposer (ou non) de leur propres culs. En brandissant (s’il vous plait!) une bible dans notre Assemblée Nationale prétendument laïque, et ce, alors qu’elle a elle même engendré plus ou moins secrètement des enfants congénitaux avec un membre de sa propre famille.

Tout ça est manifestement très sain et d’une logique implacable !

 

8- Si on légalise le mariage pour tous, il n’y a pas de raisons qu’on ne légalise pas aussi la polygamie. (D’après M. Alain Soral).

Je pense que M. Soral a démontré dans cette phrase toute la tolérance et l’ouverture d’esprit dont il est secrètement capable de faire preuve. Et pour cela il mérite un gros bisou.

Il a d’ailleurs précisé qu’il avait apparemment plusieurs propositions d’admiratrices désireuses de devenir ses prochaines épouses secondaires, donc il me semblerait tout à fait naturel qu’il ait légalement le droit de les épouser en France. Je n’y vois personnellement rien de choquant.

Tout comme il me semblerait parfaitement naturel que la femme de M. Soral puisse bien évidemment en retour devenir polyandre, et épouser tous les messieurs qui lui plaisent, et consommer autant de mariages qu’elle veut, sans modération. Il y a fort à parier que ça leur ferait d’ailleurs réciproquement le plus grand bien de pouvoir varier les partenaires de façon bien assumée et en toute légalité.

La polygamie me semble donc être une loi tout à fait acceptable, à condition qu’elle ne soit pas à sens unique et qu’on la considère de façon cohérente : C’est-à-dire vraiment pour tous mais naturellement AUSSI pour TOUTES, c’est à dire accompagnée de la légalisation logique de la polyandrie).

 

9- Il n’y a pas eu de RÉFÉRENDUM ! C’est aux FRANÇAIS de décider de ce genre de changement qui va irrémédiablement bouleverser TOUTE la société !

Je crois effectivement qu’un référendum est nécessaire pour toutes les questions de société de cette ampleur !

Il m’aurait par exemple paru très très trèèès intelligent que les français soient consultés  le 27 avril 1848, lorsque le gouvernement (PROVISOIRE en plus !!!) de la deuxième république a décrété arbitrairement l’abolition de l’esclavage en France, alors que cela allait RUINER irrémédiablement nombre d’influents industriels et de bourgeois qui auraient certainement bien aimé s’exprimer là dessus ! Si les français (tellement pleins de bon sens) avaient eu leur mot à dire à ce moment là, il est certain que les choses ne se seraient peut être pas passées comme ça.

C’est pourquoi je pense que concernant le mariage pour tous, il serait normal de faire entièrement confiance à la grande intelligence du peuple français et à l’immense sagesse de nos compatriotes zélés, qui (bien cachés derrière le très pratique anonymat d’un vote secret) s’exprimeraient certainement volontiers à cœur ouvert sur le retour au droit gratuit d’opprimer le voisin.

Mais dans la mesure où le sujet serait la remise en question du « mariage de tous », il serait donc parfaitement naturel de réellement aborder la rectification du mariage POUR TOUS les français précisément, non ?

– Doit on laisser le droit de se marier à deux personnes de même sexe ?

Certes, c’est une chose. Mais en tant que « bon français » pensez vous également en votre for intérieur qu’on doive :

– laisser le droit de se marier à deux personnes incapables d’enfanter ?

– laisser le droit de se marier à deux personnes ayant plus de 25 ans d’écart ?

– laisser le droit de se marier aux handicapés ?

– laisser le droit de se marier aux pauvres ?

– laisser le droit de se marier aux moches?

– laisser le droit de se marier aux alcooliques et aux drogués?

– laisser le droit de se marier aux personnes ayant un casier judiciaire ?

– laisser le droit de se marier aux femmes qui ne sont plus vierges ?

– laisser le droit de se marier en France aux personnes de nationalité étrangère ?

– laisser le droit de se marier aux personnes de couleur ?

– laisser le droit de se marier aux juifs et aux musulmans ?

– laisser le droit de se marier aux hétéros ?

… etc.

(T’inquiètes, je vais t’en « proposer », moi, des référendums!)

Il y aurait PLEIN de sujets de société à aborder lors de cette révision globale du mariage de tous, et il est certain que les résultats d’un tel référendum seraient très intéressants à lire étant donné la diversité d’identités socioculturelles dont s’enorgueillit si souvent notre si beau pays. (Les réponses fleureraient bon la sagesse populaire à n’en point douter !) Et ça serait une bonne bouffée d’ « humanité » qui réchaufferaient surement le cœur de chacun !

Et ça serait même encore plus intéressant d’essayer d’ensuite APPLIQUER ces résultats! (Au nom du sacrosaint principe« démocratique » bien sur).

 

10- Je suis CONTRE le mariage de deux personnes du même sexe car cela ME dérange profondément et viscéralement.

Si une personne se trouve dégoûtée par l’idée de se marier avec une personne du même sexe, je lui conseille vivement de plutôt se marier avec une personne du sexe opposé. Car cela ne changera du coup strictement plus rien pour elle au final. (J’informe ceux à qui ça aurait échappé que le mariage hétéro reste justement inclus dans le mariage pour tous !)

Seulement la voila la seule VRAIE raison dont découlent toutes les autres : La petite haine sourde qui murmure dans les têtes, la vexation minable de voir une caste « d’anormaux inférieurs » accéder soudain aux mêmes droits que ceux des gens « normaux bien comme il faut ».

Que les « tolérés » accèdent aux droits des (prétendus) « tolérants ». Parce que finalement c’est bel et bien CA l’unique chose qui va changer pour eux en fait : Il devient plus difficile d’opprimer des gens dont les droits seront sensiblement les mêmes !

La peur de voir l’inférieur arriver à égalité. Parce que les voir soudain a égalité, ça donne l’impression « d’être rattrapés » et donc l’impression de perdre du terrain. Mais c’est faux. Il n’y a RIEN de perdu. Ce gâteau là, contrairement aux autres, il y en a pour tout le monde! Vous avez l’impression que vous allez en manquer parce que vous êtes habitués à ce qu’on ne vous le distribue qu’à vous… Mais il y en a une part pour chacun et chacune pourtant. (A moins qu’on ne puisse un jour devenir « plus égal » qu’un autre…)

***

Mon avis sur tout ce cirque ?

A titre strictement personnel, je trouve que ce sont les idées mêmes du mariage et de la fidélité qui sont « contre natures », ainsi que de continuer à dangereusement proliférer alors qu’on en a déjà 9 milliards d’humains sur Terre. La planète étouffe au sens propre, et on court à un désastre écologique sans précédent. (La plupart des scientifiques prédisent que l’humanité risque immanquablement de disparaitre définitivement si les naissances ne sont pas rapidement limitées).

Pourtant, je pense que les LGBTI doivent – comme n’importe qui – avoir le droit de choisir de ne PAS se marier. Et pour ça il faut au départ qu’ils et elles en aient la possibilité. Il me parait également primordial de leur reconnaitre le droit d’élever (aussi mal que n’importe que hétéro de base) leurs propres enfants, ou des enfants adoptés, ou obtenus par PMA. Le droit de contribuer pleinement au désastre planétaire ne doit pas rester le privilège de certains, qui s’auto-proclament « normaux », et qui défilent dans les rues au nom de leurs convictions et de leurs minuscules avis que personne ne leur demande. (Le « niveau » des griefs consterne immanquablement lorsqu’on perd le temps nécessaire pour y prêter attention : En effet: Si vous voulez lire certains de ces avis énoncés librement, beaucoup sont justement listés sur cette page.)

Ne perdez pas de vue qu’il y a même pas 1 siècle de ça, la plupart des parents des auteurs de ces posts incroyablement haineux, étaient globalement (de part leur origines), dans la même situation sociale & légale que celles et ceux sur lesquels ils crachent ouvertement et délibérément aujourd’hui. Alors qu’ils devraient se considérer comme frères et sœurs de souffrance, puisqu’ils sont exactement au même emplacement social – c’est à dire tout à la base de la pyramide.

Ce qu’il ne faut pas oublier non plus, c’est qu’on peut bien sur légiférer sur beaucoup de choses, mais pas sur la tolérance malheureusement… La tolérance ne s’impose pas au gens en faisant simplement des lois – elle se gagne. Elle se mérite. Elle se cultive ; et il me semble personnellement que certaines personnes sont indéniablement plus méritantes que d’autres dans leurs démonstrations de « civisme ». (Alors que d’autres me semblent très largement mériter la haine dont ils écopent mathématiquement en retour de leurs incessantes incivilités) – Mais je vous laisse naturellement en juger par vous même en parcourant ce petit lien.

C’est un peu tristounet d’observer ces minorités qui s’imaginent naïvement être suffisamment « tolérées » pour tenir des discours de juges offusqués, alors qu’ils étaient hier encore précisément dans le box de ceux qu’ils se croient aujourd’hui en position de condamner ! (Et qu’ils y sont toujours bien qu’ils supposent incompréhensiblement être ailleurs – tout comme moi – et tout comme vous).

D’après mon expérience intime, les homos, lesbiennes, et trans me semblent tout aussi faillibles insupportables et irresponsables que n’importe quel autre humain de base. Pas pires, mais certainement pas meilleurs non plus. Et c’est donc à ce titre, qu’il me parait indispensable qu’ils et elles se retrouvent à la même enseigne et avec le mêmes droits que le reste ! (Même si d’après moi cela n’a pas vraiment de sens de vouloir absolument bouffer la même merde que le voisin, mais bon…)

Je confesse également espérer que cette loi subsiste et se renforce, juste pour pouvoir bien jouir du profond ridicule des auteurs des tweets répertoriés sur le lien plus haut. Qui loin de nous faire l’immense plaisir de quitter le pays une bonne fois pour toutes (comme ils le promettent si souvent et si fallacieusement dans leurs laborieuses indignations), vont bien entendu rester en France pour continuer d’y être subis par tous.

Et je suis par contre bien certaine qu’eux ne manqueront jamais une seule occasion de s’énerver, d’insulter, ou de pleurnicher devant une inégalité de droits dont ils seraient victimes. (Ou devant « l’incompréhensible intolérance » dont ils sont si souvent l’objet – allez savoir pourquoi…)

Cette ambiance haineuse, teintée d’ignorance et de stupidité (et mêlée de cette si amusante pointe d’illettrisme dont sont coutumiers certaines des castes les plus pittoresques de notre société) devient assez insupportable et irrespirable pour moi. Je n’en peux plus de devoir supporter ce ramassis d’abrutis sur mes écrans d’ordi ou de télé.

Ces petits groupuscules agglomérés en rassurantes communautés dont chacune se suppose plus légitime que toutes les autres réunies, bien rangés en rang, par couleurs, par religions, par superstitions, par cultures, par sexualités… Dans des boites en formes de pays… Et qui s’insultent ouvertement, s’oppriment et se tabassent à longueur de temps – à tenter indéfiniment de s’écraser les uns les autres par manipulations, persuadés que leur insignifiant avis est le seul qui prévaut sur celui du reste du monde!

…Tout ça au lieu d’essayer de vivre ensemble et d’évoluer vers quelque chose de plus beau, de plus logique, et de meilleur.

Ma conclusion, c’est que l’humanité telle que je la subis en ce moment ne mérite (certes) pas vraiment de vie meilleure, (ni moi d’ailleurs – je ne m’exclus pas de ce triste constat.) Mais cela ne doit pas nous empêcher d’essayer de rester (ou de devenir) « justes » et « cohérents » autant que possible. Bien sur, j’ai très souvent honte d’être humaine. Particulièrement en ce moment, quand je vois les épuisants et pénibles comportements de certains.

Et c’est pourquoi je me suis permise de me délester un peu de mon très vif agacement de tout cela en vous infligeant ces interminables lignes.

Merci de les avoir lues, je vous donne mon bonsoir.

L’Histoire de Lou (13)

Le corps de Lou (2/2)

Sculpture "Femme joyeuse" d'Alain Guillotin

Sculpture « Femme joyeuse » d’Alain Guillotin

Il y a quelques années Lou avait réalisé comme finalement son corps et elle faisaient deux.
« Tu sais je n’arrivais même pas à dire ces termes : « mon corps » … non .. l’expression qui était la plus juste pour moi était « le corps dans lequel je vis » … comme une distance, un détachement … »
Un jour, dans un groupe, Lou exprima cela : la distance qu’elle ressentait vis à vis du corps dans lequel elle vivait.
Les regards interrogateurs qu’elle reçut en réponse à la révélation qu’elle venait de livrer lui firent comprendre que cette perception lui était propre, qu’elle n’était vraisemblablement pas partagée par les autres membres de l’assistance.
« J’étais donc la seule à ressentir cela ? »

Ce fut des mois plus tard, lorsqu’elle s’appliquait à modeler son corps à ce qu’elle voulait qu’il soit, qu’elle réalisa à quel point cette vérité qu’elle avait formulée avait sens.

« Je crois que j’ai pris conscience là que cette distanciation était directement issue de mes expériences d’abus. Comme si, vois-tu, je m’étais alors définitivement extirpé de mon corps et que celui-ci n’était plus qu’une enveloppe charnelle dans laquelle moi j’évoluais mais qui ne me constituait pas … Ce fut très étrange cette révélation … »

En somme la transition de Lou, constituait parallèlement une entreprise de réincarnation, une manière, pour elle, de reprendre possession de ce bien dont elle s’était autrefois séparé, de cette partie d’elle-même qu’elle avait autrefois abandonnée …

« Je me suis évidemment longuement interrogée sur les incidences de ces expériences d’abus sur ma transidentité … »

Dans sa recherche intérieure Lou avait retrouvé des traces de sa féminité dans son passé plus lointain encore et notamment dans sa perception d’elle-même. « Heureusement ! , me dit-elle.
« J’aime à penser que ces expériences avec mon père n’ont eu aucune incidence sur mon désir de vivre femme, voire sur ma perception féminine de moi-même. Je ne voudrais pas lui donner cela. »

« Dans sa réalité je n’étais pas femme avec lui … c’est ma masculinité naissante d’enfant, ou d’adolescent, qui était l’objet de son délire. »

Si bien sûr, Lou s’était interrogée sur sa non-masculinité et son refus de son désir masculin, en lien avec ce qu’elle avait pu vivre, il lui était confortable de réaliser que ses jeux d’enfants étaient des jeux dits « féminins », que ses amis d’autrefois les plus chers étaient des amies et qu’elle gardait par conséquent la totale responsabilité de ce qu’elle était aujourd’hui. « Je ne voudrais pas lui donner cela. » m’avait-elle dit.

Par ailleurs, au fur et à mesure de l’évolution de son corps, au fur et à mesure que son regard se modifiait, dans le sens où plus le temps passait, plus sa vision de celui-ci était féminine, plus alors Lou remarquait que « curieusement » elle se mettait à apprécier la rondeur des formes féminines et en venait à regarder les femmes, toutes les femmes, autrement.

Imperceptiblement, elle prenait conscience de la féminité qui « prenait forme » en elle et elle s’en réjouissait. « C’est comme si quelque chose se modifiait en profondeur sur ma perception de la beauté féminine ou peut-être plus exactement sur la féminité. »

Auparavant, bien auparavant, c’est à dire à l’époque où Lou regardait les femmes plus que les hommes, ses attirances allaient clairement vers les femmes androgynes, ou qui, en tous les cas n’avaient précisément pas ces rondeurs qu’elle évoquaient maintenant.

« Le fait de voir celles-ci poindre chez moi, a changé ma vision ! Je me suis mise à les apprécier comme une identification directe de ma féminité, donc plus généralement de La féminité. »

Du coup, les différences corporelles entre les hommes et les femmes sont devenues pour Lou plus voyantes, plus caractérisables … Elle s’aperçut, au fil des mois que même son regard sur les hommes se modifiait. Elle n’en appréciait finalement que plus, les spécificités de la sexuation des corps et cela la renvoyait plus encore à son besoin de se séparer le plus totalement possible de ces marques corporelles qui caractérisaient encore sa masculinité passée.

Cela faisait un peu moins d’un an que Lou était sous traitement hormonal, lorsqu’elle me dit, fantasme ou réalité, qu’elle percevait (déjà) chez elle des évolutions corporelles comme un léger affaissement de ses épaules ou un léger renflement de ses hanches.
Fantasme ou réalité ? Etait-ce son corps qui évoluait ou bien son regard qui se transformait ? Je sentais, en tout état de cause, que ces légères modifications corporelles, comme à l’époque où Lou guettait la croissance naissante de ses seins, fortifiaient en elle sa perception intime de sa transformation et qu’elles favorisaient l’intégration, l’incarnation de sa féminité. Et cela semblait bon pour elle !

Même son visage, me dit-elle, prenait des formes différentes.
Elle le trouvait plus féminin sans savoir définir exactement pourquoi.

En somme, elle goûtait les joies de l’hormonothérapie qu’elle avait décidé de suivre et chaque jour elle s’en félicitait !

« Tout est mieux dans le meilleur des mondes, Lou, alors ?! »
Lou sourit lorsque je lui fis cette remarque un tant soit peu provocatrice.
« Tu veux que je te parle de ce qui ne va pas, c’est ça ?! »
Je ne savais pas exactement pourquoi je lui avais posé cette question ; peut-être me semblait-il que ce tableau était un peu trop « idyllique », qu’il manquait d’objectivité et, dans ma recherche de la Vérité, avec un grand V, il m’aurait paru peu juste de m’en tenir là, ou tout au moins, il me semblait nécessaire d’interroger Lou sur cela.

« Ai-je envie de t’en parler ? » s’interrogea Lou, non sans un sourire.
Elle m’avoua alors qu’elle n’aimait pas « toutes les formes » que prenait son corps et qu’elle guettait notamment l’évolution de ses fesses dont les formes qu’elle caractérisait de masculines, musclées et rebondies, lui convenaient tout à fait et qu’elle ne souhaitait donc pas les voir se modifier !

« A une époque de ma vie, je disais, « mes fesses c’est mon fond de commerce ! » … mais c’était un autre temps ! » Elle avait en tous les cas gardé un certain attachement à cette partie de son corps et elle nota à cette occasion que si, pendant des années, il lui était difficile de parles de « son » corps, parler de « ses » fesses n’avait jamais été une difficulté.

Lou me parla alors, mais je vous passerai les détails, comme elle appréhendait différemment chaque partie de son corps. Certaines lui appartenaient depuis longtemps, d’autres assez récemment, et d’autres enfin lui paraissaient encore comme un peu étrangères.

Je réalisai alors comme ce travail, que j’appellerais son « travail de réincarnation », se faisait en profondeur et comme il fallait de temps à Lou pour en venir à bout, si tant est qu’elle en viendrait un jour à bout.

« Et ton sexe ? » lui demandais-je.
Lou sourit : « Je m’attendais à ce que tu me poses cette question ! En fait, tu vois, avec mon sexe j’ai un rapport un peu particulier … J’ai une perception un peu extérieure de lui … Comme un objet, en fait … mais un objet qui aurait sa vie propre … c’est un peu étrange … Et tu vois, avec les anti-androgènes, c’est un peu comme si je reprenais le pouvoir sur lui. Je suis contente de constater la diminution de la taille des gonades, je suis contente de constater la disparition des éjaculations … oui je reprends le pouvoir sur lui ! Et quelque part je me dis que si j’arrive à obtenir sa transformation, sa transformation en sexe féminin, je veux dire … eh bien … là … oui … je crois que ce sera mon sexe … ce sera en tous les cas celui que j’aurais décidé ! »

Comme s’il fallait que Lou redessine son corps ? Comme s’il lui fallait le recréer pour se le réapproprier ? Je compris alors que Lou était devenue, en quelque sorte, l’artisane de son nouveau corps !

@ suivre

L’Histoire de Lou (9)

9ème épisode : L’expertise
L'histoire de Lou 09
En France en 2013, pour obtenir un changement d’état civil une Personne transgenre doit obtenir un certificat médical prouvant son transexualisme.

La cour de cassation de Paris dans un jugement du 13 février 2013 (1) rappelle cela : «attendu que, pour justifier une demande de rectification de la mention du sexe figurant dans un acte de naissance, la personne doit établir, au regard de ce qui est communément admis par la communauté scientifique, la réalité du syndrome transsexuel dont elle est atteinte (…)» . Pour ce faire, le recours à des experts, issus de la « communauté scientifique », s’avère donc nécessaire.

« Pour moi l’affaire est assez claire, voyez-vous. Les relations sexuelles que la malade a entretenues avec son père, démontrent clairement qu’elle était dans une forme assez particulière d’Oedipe inversé ; je vous rappelle à ce titre que le premier cas d’Oedipe inversé a été décrit dans un excellent ouvrage du Docteur Freud en 1935, et que celle-ci, l’inversion de l’Œdipe, je veux dire, provient incontestablement d’une identification inversée à la mère dans les toutes premières années.
Quand nous retraçons l’histoire de l’enfant nous constatons comme la mère, une femme énergique et autoritaire a pu exercer sur celui-ci ou celle-ci, on ne sait plus trop quoi dire !, un pouvoir castrateur et morbide qui l’a transformée, elle, aux yeux de l’enfant, en rivale.
Par ailleurs le désir de l’enfant pour son père, s’il peut surprendre au premier abord le néophyte, démontre clairement les tendances perverses de la malade qu’elle a développées, du reste, pendant le reste de sa vie.
Finalement son père n’a fait que répondre au désir pervers narcissique de l’enfant qui tentait de le séduire afin de prendre symboliquement la place de sa mère.
– Donc, pour vous, Docteur Block, les causes du transexualisme, sont par conséquent très claires et caractérisées ?
– Oui, oui, tout à fait, tout à fait … je dirais même, on ne peut plus claires et avérées. Il est même assez rare de trouver des cas pour lesquels nous nous entendons si rapidement pour rédiger un diagnostic ! N’est-ce pas Docteur Schprountz !
– Tout à fait Docteur Block ! Toutefois ….
– Toutefois ? …
– Oui … toutefois …
– Toutefois ?
– Je rajouterais volontiers un point supplémentaire.
– Ah … Faites … je vous en prie Docteur Schprountz.
– En fait, le cas de cette patiente me fait penser, à celui d’une autre que j’ai eu à traiter il y a quelques années, Dieu ait son âme, qui présentait un transexualisme aigue, comme notre patiente, et dont nous avions diagnostiqué des tendances hystériques fortement développées et par voie de conséquence je me demande, chez notre patiente, comment celle-ci traite ses propres pulsions hystériques ….
– Ah, mais Dc Schprountz, ceci est absolument évident … N’avez-vous pas remarqué les attitudes provocantes de la malade .. Elle gonfle sa poitrine, elle cherche à exciter les hommes avec des tenues affriolantes … (chuchotant soudain) Tenez, ne vous retournez pas, mais je suis certain qu’en ce moment-même, elle fait mine de nous écouter mais qu’en réalité elle cherche à nous séduire. Moi qui l’ai en face je peux vous dire que sa manière de me regarder est loin d’être celle d’une sainte nitouche ! (rehaussant le ton) si je peux me permettre, Docteur Schprountz.
– Je vois … je vois …
– Mais vous ne pouvez la voir, vous êtes de dos !
– Mais puisque je vous dis que je vois …
– Comment cela, vous voyez ?
– Mais dans le reflet de la fenêtre Docteur Block.
– Soit. Dans le reflet de la fenêtre … et vous conviendrez donc comme moi que nous pouvons sans conteste diagnostiquer un cas de transexualisme à tendance hystérico-perverse, n’est-ce pas ?
– Oui, oui .. tout à fait Docteur Block … tout à fait.
– Vous êtes donc d’accord avec moi, voilà qui me ravit, cette expertise n’aura finalement pas été trop longue !
– Toutefois ….
– Toutefois ? …
– Oui … toutefois …
– Quoi, toutefois ?
– Je rajouterais volontiers un point supplémentaire.
– Ah … mais … je vous en prie Docteur Schprountz.
– Eh bien Docteur Block, je ressens chez la patiente un état de découragement intense … Ne ressentez-vous pas la même chose Docteur Block ?
– Non, non … moi je ressentais plutôt une certaine joie que nous ayons pu ainsi achever notre expertise … et une petite faim aussi, peut-être !
– Mais je ne parle pas de vous Docteur Block.
– Ah, je l’espère bien !
– Je disais que je ressens, chez la patiente, comme un état de découragement profond … Voyez-vous, depuis qu’elle est ici, elle n’a pas dit un mot, elle nous regarde d’un regard vague, légèrement vitreux – vous avez observé son fond de l’œil ? – et semble profondément déprimée …
– Ah, j’ai compris Docteur Schprountz, vous voulez pointer le syndrome dépressif de la patiente … Alors là, Docteur Schprountz, je vous dis bravo ! .. ça allait précisément m’échapper … Donc je note : mhhh … transexualisme primaire à tendance hystérico-perverse … euh … je vais donc plutôt noter à « fortes » tendances hystérico-perverses présentant un syndrôme dépressif … caractérisé, oui, je vais rajouter « caractérisé », cela fait tout de suite plus … affirmé, n’est-ce-pas ?
– Oui oui …
– Bon alors, nous y sommes … Vous avez quelque chose à rajouter Docteur Schprountz ?
– Non, non …
– Toutefois ?
– Quoi toutefois ?
– Vous n’avez pas un petit toutefois ?
– Vous vous moquez, Docteur Block !
– Oui, je vous avoue, j’aime assez vous taquiner ! Où souhaitez-vous déjeuner Docteur Schprountz ? Je connais une petite brasserie pas très loin d’ici qui …

– Bon, si vous avez fini, je peux la récupérer mon expertise ?

– Ah excusez-nous, nous vous avions complètement oubliée ! Que c’est drôle Docteur Schprountz !
– N’est-ce pas Docteur Block ! »

Lors de ce même jugement de février 2013, la cour de cassation rappelle la position répétée de la jurisprudence qui précise que la Demanderesse doit également établir « le caractère irréversible de la transformation de son apparence »
En l’absence de vérification visuelle par les juges, lors de l’audience, quant à la véracité de la transformation, une preuve médico-chirurgicale du changement de sexe doit être apportée.
Pour ce faire le recours à des experts, à la charge de la demanderesse (2) est alors ordonné.

« On regarde sa zézette maintenant, Docteur Schprountz ?
– Je vous en prie, Docteur Block.
»

Je ressens, à relater cette situation, un profond sentiment de honte envers ces Personnes, traitées de façon humiliante par ces binômes médico-judiciaire et ce en l’absence d’une législation claire et respectueuse des Personnes, sur le sujet.

Ces situations évoquent en moi d’autres expertises des parties génitales, en d’autres temps, qui déterminaient l’éventuel voyage sans retour de l’expertisé, vers des camps teutons éloignés.

@ suivre

(1) Arrêt n° 108 du 13 février 2013 (12.11-949) – Cour de cassation de Paris – Première chambre civile – ECLI:FR:CCASS:C100108
(2) Le coût de ces expertises peut être évalué entre 1200 € et 3000 € selon les dires des personnes concernées.

L’Histoire de Lou (7)

7ème épisode : Dysphorée du genre

La Toile d'araignée - Paul Newman

La Toile d’araignée – Paul Newman : http://www.toutlecine.com

«La dysphorie de genre, moi j’aime plutôt ! Y en a qui dise que ça fait pathos et tout ça, mais moi, j’aime plutôt ! Lorsque j’ai lu des études qui décrivaient – ou décrivent – la dysphorie de genre, eh bien je me suis dit, « Ah alors, ça existe donc, je ne suis pas toute seule à vivre cela, puisqu’y z’ont même créé un nom pour ça ! », donc, oui la dysphorie de genre, ça a plutôt été une bonne chose pour moi, une bonne révélation !
Tu sais, en fait c’est un peu comme l’homosexualité : une fille vivant dans un monde rempli d’hétéros qui constate qu’elle est attirée par les filles, c’est un choc ; mais si elle sait que cela s’appelle l’homosexualité et qu’il y a plein de filles comme elles qui aiment les filles, eh bien, là, ça va tout de suite mieux ! En tous les cas, c’est comme ça que ça s’est passé pour moi ! Dans les deux cas, du reste – j’ai fait la totale !

Bien sûr si après on dit que les trans c’est des malades et qu’il faut les soigner, là je ne suis plus d’accord ! Mais là aussi, je peux faire le parallèle avec l’homosexualité : se sentir dysphorée du genre c’est comme se sentir gay ou goudou, ça ne se soigne pas ! ça s’assume, ça se revendique, puis ça finit au palais Bourbon !

Là où y a un truc qui est vraiment différent de l’homosexualité, et qui pose un vrai dilemme, je trouve, c’est qu’il y a un vrai paradoxe dans la mise en œuvre de sa dysphorie de genre. Si tu es gay, à part le prix des capotes, tu n’as pas beaucoup de frais ! Les boites gays, ça coûte même moins cher que les boites hétéros, les bars idem, sauf si tu vas à bobo land, ça c’est sûr ! Et puis c’est tout comme frais ! Oh ! éventuellement un petit lifting pour passer la quarantaine mais ça c’est juste optionnel !

Etre dysphorée du genre, c’est autre chose, tu vois : entre le traitement, à vie, ma chère, l’épilation laser, les opérations diverses et variées et tutti quanti, c’est pas une cinécure cette petite histoire ! … Et donc … hein … qui c’est qui paye ? Et c’est là qu’il y a un paradoxe, tu vois : soit c’est la personne dysphorée du genre qui assume financièrement sa dysphorie et finalement ça devient un truc de riches, soit c’est la communauté qui paye, mais alors dans ce cas, il peut être logique de se demander pourquoi qu’elle paierait, la société ? La réponse aujourd’hui c’est qu’elle paye (en partie) si les dysphoréEs du genre sont considéréEs comme des malades ! Et le paradoxe est là pour moi : vouloir être considéréE, tout à fait légitimement, comme une Personne comme vous et moi d’une part, et vouloir que nos soins, traitements, opérations, soient prises en charge par la communauté, d’autre part.

C’est vrai que le paradoxe, comme je viens de le poser, repose sur le fait que si la sécurité sociale paye il va falloir cocher une case : la cause c’est quoi ? Est-ce des raisons de confort ? Est-ce que cela va toucher le processus vitale ? Est-ce préventif ? etc.. Là il y a un vrai débat et vues les restrictions tous azimuts actuelles, si le débat était clairement posé aujourd’hui, ce ne serait pas gagné ! Donc il y a un certain intérêt à être cochée comme malade de la dysphorie !

Bien sûr on peut arguer que si tu es dysphoréE du genre et que si tu ne transitionnes pas, alors ça va mal aller la vie et que du coup c’est mieux de payer pour la transition, qui rend guériE, que de payer des anti-anxiolytiques ou des anti-dépresseurs à vie ….

Ceci dit, n’exagérons pas non plus l’intérêt qu’il peut y avoir à être misE en case dysphoréE ! Les coûts vraiment les plus importants ça reste la chirurgie et notamment les chirurgies faciale et génitale : la chirurgie du visage, c’est classé directement comme esthétique, c’est plein pot pour toi, quant à la génitale, comme tu sais, en France, c’est même pas la peine d’essayer : si tu veux te retrouver avec un machin difforme après t’être fait malmenée par une bande de pseudo-psychiatres experts en dysphorie pouët pouët, tu auras tout bon. Donc y a que l’étranger : Thaïlande, Quebec, Belgique, disent certaines … et là, c’est aussi plein pot pour toi.

Et puis il y a le traitement … c’est pas très cher, peut-être 30/40 euros par mois. Mais bon c’est toujours bon à prendre ! Pour ma part, ça justifie en partie ma complémentaire santé en tous les cas ! Et puis il y a les rendez-vous chez le doc, les examens de sang etc … Pour ce qui est des épilations laser, moi j’ai décidé de les prendre à ma charge, – parce que je ne suis pas sur la paille, non plus ! – mais là où ça a commencé à me mettre en colère c’est que maintenant ils nous font payer la TVA : et hop 20% de plus ! … La séance à 100 euros, c’était pas donné, déjà, passe à 120 … moi, ça me gave ! Je veux bien payer, mais il ne faut pas me prendre pour une vache à lait non plus. Alors j’ai décidé pour l’épilation électrique de me faire classer ALD (Affection Longue Durée) et du coup, pouf, je retombe dans le paradoxe ! Donc d’un côté je crie haut et fort à ceux et celles qui veulent bien me lire « Je suis NORMALEment différente et pas une malade du ciboulot comme qu’on voudrait nous le faire croire» et d’un autre je me fais classer « Affectée pour un long moment », histoire de remettre un peu de justice à ma sauce !! …

Après il y a les filles et les gars qui sont pas aidées par papa/maman. Alors il faut qu’illes fassent avec les moyens du bord. Soit qu’illes rentrent dans les protocoles officiels et bonjour les dégâts, soit qu’illes trouvent des financements parallèles. Bien sûr il y a les mécènes. Mais les mécènes, ça ne court pas les rues. Les mécènes les plus courants des rues, c’est les mécènes qui consomment sur place et qui préfèrent le mécénat à répétition qu’une vraie, bonne et lourde action charitable. Remarque, j’en ai connu ou j’en connais des hommes qui s’en prennent pour une petite et qui l’aide à franchir les étapes. Ça peut même être plutôt sympa. Après, il ne faut pas forcément rechercher trop loin les motivations de la petite, mais bon, c’est une forme de contrat entre deux personnes de bon entendement, alors y a rien à dire, tu vois … Enfin, moi je n’ai rien à en redire.

Ceux et celles qui n’ont pas de sous et qui ne peuvent ou ne veulent s’assurer les services d’un mécène, doivent s’en remettre aux spécialistes de la transgenritude. Finalement le pouvoir qu’ils ont, – qu’ils ont pris – ceux-là, c’est à cause de l’argent. Tu sais, j’ai vu des jeunes nanas ou des p’tits gars, à qui il est arrivé des trucs à faire pleurer parce qu’ils étaient dans les mains de ces gens-là … Un jour je te raconterai.

Donc, tout ça pour te dire quoi ? Tout ça pour te dire que la question de la prise en charge de la transformation, c’est un vrai souci. Aujourd’hui une srs en Thaïlande, ça te coûte dans les dix douze mille euros et au Québec dans les dix huit mille, tout compris, voyage et tout. A ce prix là ce sont vraiment des artistes, mais ça reste vraiment très cher, tu vois. Bien sûr tu peux trouver moins cher mais le résultat, hum hum … La FFS, tu peux trouver sur Paris, genre six sept mille euros. Pour l’épilation faut compter peut-être deux mille euros pour le visage et le corps ça dépend du travail ! … Enfin, comme tu vois c’est une vraie rente cette petite affaire. Donc, question : qui c’est qui paye ? Tu me diras, ça coûte moins cher qu’un appartement et pas beaucoup plus cher qu’une BM !, une grosse BM, quand même ! … »

Oui, comme me le faisait remarquer Lou, « Qui c’est qui paye ? » !
Nous avions régulièrement, elle et moi cette discussion, autour de la prise en charge de la transformation. Lou me soutenait que si celle-ci était intégrée dans la société, les coûts pourraient être nettement diminués. De son côté, elle trouvait cela acceptable que son traitement soit payé par la communauté, comme elle disait, ainsi qu’une partie de l’épilation, mais elle aurait eu quelques scrupules à se faire payer la chirurgie génitale. « Moi, c’est comme ça que c’est juste pour moi. Et la FFS, je crois que je pourrai m’en passer …mais je ne parle que de moi …»

@ suivre
Le 8ème épisode de « L’Histoire de Lou » sera mis en ligne le dimanche 17 mars à 10h.

L’Histoire de Lou (6)

6ème épisode : lhomme

Un borborygme dans la salle d’eau.
Lou est dans le lit, immobile.
Elle sait que bientôt lhomme reviendra.
Reviendra auprès d’elle.
L’odeur de la sueur. Un petit peu acide. Un petit peu caramélisée.
Il lui dira encore des mots, dont la signification profonde est étrangère à Lou. Comme si d’une vague de mots elle n’en percevait que l’écume.
Il lui parlera de l’amour qu’il a, lui, lhomme pour Lou, il lui dira les mots, les mots qu’il dit à chaque fois.
Lou a froid ? Lou a peur ?
Non …
Elle n’a ni froid, ni peur … d’ailleurs elle ne tremble pas … Elle est là; immobile; elle attend ?
Non, ce n’est pas qu’elle attende; elle ne saurait attendre cela. Non, elle oublie. Elle oublie que le temps passe, elle oublie tout simplement de voir le temps passer, elle oublie un instant qu’au bout de ce temps qui passe lhomme reviendra.
C’est peut-être sa manière à elle de se protéger de lhomme.
Ses yeux suivent les lattes qui sillonnent le plafond dans un vaste méandre de bois. Ses yeux, tels un avion, survolent les paysages étranges dessinés par les nervures du pin. Ils se perdent et la perdent, elle, dans cette forêt, ni vierge ni jungle. Ils sautent des précipices, ils planent au dessus de vastes plateaux, ils enjambent des ponts et s’échappent bientôt comme papillons de nuit vers la lumière éclatante du dehors.

Le regard de Lou par la fenêtre observe maintenant la blancheur des cimes. Pureté de la neige. La neige se confond avec le ciel. Montagnes sans relief, cimes sans sommet, vallées sans col. Tout est uni, blanc, gris. Les nuages sont-ils trop bas ? La lumière est-elle trop vive ?

Lou ferme les yeux. Mais ses yeux sont grands ouverts derrière ses paupières closes. Lhomme peut-être aujourd’hui respectera-t-il son sommeil ? Ses nerfs sont tendus. Elle est toujours immobile. Encore plus immobile.

Elle s’efforce maintenant de respirer calmement, posément, uniformément. Lhomme observera son souffle, la régularité de son souffle.
Si elle dort, lhomme respectera peut-être son sommeil. Telle un animal traqué dans la nuit, telle un lièvre embusqué au fond de son terrier, elle entend le souffle se rapprocher. A moins qu’il ne s’agisse du déplacement des pieds sur le sol. Elle ne bouge pas. Elle est immobile. Son souffle même, et malgré elle s’est arrêté. Son coeur semble à son tour attendre pour battre. Un léger tremblement a fait vibrer sa main droite sous le drap posé. Elle sent au fond de ses oreilles, le sang presser ses tympans qui battent maintenant à un rythme saccadé.

Elle visualise la montagne et la ligne imaginaire sur lequel son regard se déplaçait encore il y a quelques instants. Mais elle pressent déjà le corps qui va se poser et elle sentira le creux que celui-ci provoquera et dans lequel si elle n’y prend garde son corps à elle, va sombrer. Elle contracte ses muscles et de la main, celle extérieure au lit, comme le rescapé d’un bateau qui vient de chavirer, elle agrippe le drap. Elle attend. Elle entend.

Lhomme semble hésiter un instant.
Effectivement, il observe Lou, semblant vraisemblablement se demander si elle dort.

Mais, en réalité, n’observe-t-il pas plutôt l’envie qu’il a de Lou ? Endormie ou non … Ne mesure-t-il pas, en fait, l’intensité de son désir, n’apprécie-t-il pas l’opportunité de ce corps dans le lit ?

Puis il laisse tomber sur le sol la serviette qu’il avait autour de la taille.

Lorsque le poids du corps de lhomme s’enfonce dans le lit, Lou par un léger basculement incline son torse à l’opposé. Son épaule gauche a perdu le contact du drap tandis que son bassin s’est légèrement levé.
Réflexe ancestral de l’animal qui protège sa face lorsqu’il est attaqué et qu’il ne sait plus lutter ? Ou retraite foetale ?

Lou est concentrée sur ce geste lent, tenace, invisible; tous ses muscles agissent avec rigueur et volonté. Avec une application effrayante son corps en entier se contracte et se concentre, il s’applique, se tourne, s’acharne, se tend, se détend, glisse et s’enfuit ainsi.

Si lhomme l’a remarqué, (saurait-il remarquer cela ?) il s’en fout.

C’est alors que le contact se fait. C’est à ce moment que lhomme pose sa main sur le corps de Lou. C’est à ce moment que lhomme fait cela : poser sa main sur ce corps-là.
Lou ne bouge plus, soudain. Elle redevient immobile. Soudainement immobile. Intensément immobile. Mais ses muscles sont tendus. Ses muscles, comme tous ses sens semblent tétanisés.

Lou ne pense plus. Son cerveau s’est arrêté de penser. Il fonctionne. Il ne pense plus. Lou n’a plus dans son cerveau que l’image de la main sur son corps. Quelque part sur son corps.

Tout est confus pour Lou alors. Elle mélange les faits, les récits, les histoires … Elle ne sait plus trop bien s’il s’agit d’ elle ou de quelqu’un d’autre. Elle ne sait plus si elle pleurait ou si elle ne pleurait pas.
Elle ne crie pas, elle ne parle pas non plus. Bientôt la voix de lhomme avec une exquise douceur se met à vibrer pour elle.
La voix dans un souffle prononce son nom. Etait-ce même son nom ?

La voix … La voix, curieusement sait chasser les peurs. La voix sait détendre Lou. La voix connaît les mots qu’il faut. Et la voix dit ces mots : les mots qu’il faut pour que Lou détende son corps et que Lou ne repoussent plus les mains de lhomme.

Ainsi lhomme dit les mots qui l’autoriseront à caresser le corps.

Le temps passe encore avec pour seul bruit ces mots. Mots d’amour, mots de tendresse, de désir aussi …
Les yeux fermés Lou les perçoit. Est-elle sensible aux mots ou bien à la musique des mots ?
Les muscles de son corps, un à un, se détendent. Un à un. Les muscles se détendent.

Lhomme interprète cette détente comme de l’acceptation.
Il ne s’agit évidemment pas d’acceptation, ni non plus de résignation, ni même d’oubli, ni de frayeur, il ne s’agit de rien de tout cela. Il ne s’agit de rien. Rien : comme si Lou dans ce moment-ci oubliait d’être, comme si elle s’abstenait d’exister, ne laissant d’elle, finalement qu’une enveloppe de chaire et d’os, comme si elle s’extirpait de ce corps, le laissant à d’autres mains …. vide. Le corps de Lou est vide de Lou.

Lhomme a le temps, il n’est pas pressé. Lhomme sait agir sur Lou. Et il le fait. Il sait les mots qu’il faut, les caresses qu’il faut, le rythme qu’il faut. Il connaît Lou. Il la connaît.

Le corps de Lou est presque totalement imberbe : un duvet à l’aine indique la venue d’une puberté naissante. Ses yeux s’ils étaient ouverts seraient clairs.
La croissance récente de ses muscles dessinent le long de ses bras de petits vallons. Sa peau est très légèrement ambrée. Elle est douce au toucher. Lhomme aime s’y laisser glisser.

Lhomme palpe le corps, il caresse les fesses de Lou, il frôle le dos, les omoplates, la nuque de Lou. La main prend possession des fesses, du dos, des omoplates, de la nuque.
Puis la main s’applique sur l’épaule et l’abaisse. Lentement le corps vient à lui, se découvre à lui. Le corps repose bientôt sur le dos. D’un geste lent, lhomme retire le drap pour exposer la totalité du corps à son regard. Lou a frissonné.
Si elle n’avait pas les yeux fermés, elle pourrait voir le désir de lhomme. Mais Lou ferme les yeux. Résolument. Obstinément. Définitivement.

Un instant seuls les yeux de lhomme caressent le corps.
Lou voit les yeux malgré ses paupières fermées. Elle sent la chaleur vive des yeux. La brillance du regard. Le flux des pensées.

Puis les mains reprennent le chemin de la peau. Elles sont plus fermes, moins douces.
Maintenant Lou a peur. Soudainement peur. Elle sait maintenant. Elle connaît les caresses. Mais cette peur est fugitive. Violente mais fugitive. Comme un éclair dans cette ombre immense.
L’odeur de lhomme se fait plus forte. Il est nu. Il est certainement nu.
Sa bouche caresse à son tour le corps.
La bouche accompagne les mains. De multiples attouchements s’éparpillent sur tout le corps de Lou. Les mains sont expertes. Lou ne peut comprendre les mains. Le travail des mains.

Puis les mains atteignent le sexe. Les cuisses. Le ventre. Le sexe.
Elles le quittent alors pour y revenir après. Elles frôlent, s’échappent, reparaissent, elles prennent le sexe, le reposent, le caressent, l’abandonnent, l’oublient, y reviennent. Elles tracent de larges cercles, puis des cercles plus précis.

Elles palpent, étreignent, pelotent, effleurent, embrassent, frôlent, choient ….
Méthodiquement. Les mains sont expertes. Le corps de Lou réagit au travail des mains. Lhomme connaît ses mains, et le corps de Lou et l’effet de ses mains sur le corps.

Lhomme sourit, lhomme vainqueur, lhomme habile, lhomme rieur. Le sexe est dur dans sa main. Tendu. Le petit sexe est dur dans sa main.
Il continue à travailler le sexe.
Il ne le fera pas jouir. Sait-il jouir ? Lou doit être trop jeune pour jouir ! Non juste pour le jeu. Jouer à rendre dur le sexe de Lou. Lhomme pense que le sexe a du désir. Lhomme pense qu’il a fait monter le désir de Lou. Que lui, lhomme a su faire naître ce désir. Ce désir qu’il a maintenant dans sa main. et avec lequel il joue. Un instant encore. Il pense que ce désir est identique à son désir à lui pour Lou. Le sexe est dur comme le sien est dur. Il ne peut s’agir que du même désir.

Il prend la main de Lou. Il l’ouvre pour y poser son sexe à lui. La main est comme morte. La main de Lou ne prend pas le sexe. Elle ne bouge pas. Lhomme sert la main de Lou autour de son sexe à lui. Mais la main reste morte. La main ne bouge pas. La main ne se ressert ni se détend.

Lou, elle, sent les deux sexes durs.
Celui de lhomme dans sa main, et le sien dans son corps.
Lou sent la fermeté du sexe de lhomme dans sa main. Elle s’effraye des sensations dans le sien. Elle entend le souffle qui se rapproche, qui s’accélère. L’odeur du souffle se mêle à l’odeur du corps. La bouche est près de son visage. Les lèvres sont à deux doigts de s’y poser. Lou pense : « Pas la bouche. » Elle resserre ses lèvres l’une contre l’autre. Elle ne veut pas recevoir la langue de lhomme. Elle n’aime pas la langue de lhomme dans sa bouche. Le goût de la langue, la texture de la langue …

Les lèvres se posent sur ses joues. Elles embrassent. Se déplacent sur les paupières fermées. Lou frémit. Le front. Les cheveux. Puis redescendent sur le menton et se dirigent vers la bouche. « Pas la bouche. » implore Lou dans un effroyable silence, sans mot, sans aucun mot prononcé. Une larme monte à ses yeux. La langue cherche à s’insinuer, à pénétrer, à s’infiltrer.
Les yeux de Lou sont humides. Une larme a percé qui coule maintenant le long de sa tempe. Lhomme ne voit pas les larmes. Ou il n’y prête pas attention trop absorbé qu’il est par son ouvrage qui est de pénétrer la bouche de l’enfant.
Il lui parle, doucement, il caresse le visage, fin et lisse.
Bientôt la mâchoire se détend,. bientôt lhomme insinue ses lèvres dans l’interstice des lèvres. Bientôt Lou sent la langue contre sa langue.
La langue de lhomme s’enroule en volutes autour de la langue de Lou.
Sa main sur le corps de Lou. Sa main sur le sexe du corps de Lou, la main qui caresse, pourrait-on voir si l’on regardait.
Mais Lou est absente. Lou est morte. Lou n’existe plus. La raison de Lou a défailli. Lou a coupé en elle le chemin de la mémoire.
Lou ne se souviendra pas. Elle ne se souviendra plus ….

Plus tard, Lhomme se lèvera. Il quittera le lit. Il quittera la pièce.
Salle de bains.

Le corps de Lou s’endort à son tour.

Lhomme était le père de Lou.
Je pleure.

@ suivre
Le 7ème épisode de « L’Histoire de Lou » sera mis en ligne le dimanche 10 mars à 10h.